de Olivier » Lun Déc 18, 2006 22:20 26
Bonjour,
C'est seulement aujourd'hui que je me décide à venir évoquer Bruno. Non par désintérêt, loin de là, mais bien parce que c'est un sujet qui me touche beaucoup...
Je ne connaissais rien de Bruno, si ce n'est le joyeux et sympathique intervenant de ce forum. Mais son départ si abrupte n'a fait qu'évoquer en moi de trop douloureux souvenirs insupportables. Il m'a fallut digérer ces écrits pour, enfin, parvenir à aborder le sujet. J'ai volontairement évité tous les posts concernant son décès, les messages de sympathie et de soutient. C'était au-dessus de mes forces.
Néanmoins, je voulais aussi venir faire part de mon amitiés à ses proches. J'ai donc franchi le pas et je vous l'écris.
Il y a presque 4 ans, mon jeune frère est décédé, brutallement et accidentellement, la veille de ses 20 ans. Notre vie a basculé à tout jamais. Nous étions 5 à la maison... nous n'étions plus que 4.
La douleur que vous resentez, je ne la connais pas. Je ne connais que l'atroce déchirure de perdre son petit frère... C'est indescriptible. Innomable. Mais j'ai vu la douleur de mes parents. Je l'ai vécue. Subie. Supportée. Et si perdre un frère est la chose la plus difficile que j'ai connue, je crois qu'elle n'est rien à côté de celle de perdre un fils.
Malheureusement, la vie est cruelle et ne prend pas le temps de s'arrêter. Nous avons donc d'abord essayé de re-fonctionner. Pas de vivre, mais bien de re-fonctionner. Tant bien que mal, nous avons décidé de rester ensemble, de se soutenir et d'avancer. Il y a eu des moments durs. Il y a eu des moments très durs. Parce qu'après le départ, il y a l'absence. Une place vide à table, une chambre vide, un quotidien à jamais défiguré.
Je sais qu'aucun mot de soutien ni aucune phrase ne pourra jamais vous aider à combler ce vide. Mais voilà, vous êtes là. Combien de fois n'ai-je pas espéré que nos places fussent échangées? Mais j'étais là. Mes parents aussi. Mon frère cadet aussi. Et il a fallut vivre avec. Avec cette absence, cette douleur, cette tristesse.
Je ne me permettrai que de vous dire une seule chose. Parlez-en. Entre vous, surtout. N'imaginez jamais que l'autre souffre moins que vous. C'est probablement l'épreuve la plus difficile que vous vivrez. Mes parents essaient de vivre avec. Mais ils n'en parlent que très peu. Parfois ma mère aborde le sujet. Mon père aussi. Mon frère parfois. Mais c'est rare. La blessure est top douloureuse et la conversation dévie bien vite avant que n'apparaisse l'ombre d'une larme. Ils ont essayé de se faire aider au début. Mais c'était très douloureux. Ils ont abandonné. De temps à autres ils essayent d'en parler entre eux, mais je sais combien ils peinent. Nous aussi. Je ne parviens pas à en parler avec ma compagne, si ce n'est pour évoquer de courts souvenirs, souvent cocasses. Mais lui parler de ma douleur m'est impossible.
Maintenant, 4 ans après, la peine et la douleur sont toujours là. Cela a évolué, mais pas en mieux. La seule chose a faire est de crever l'abcès, d'en parler, serainement, ensemble ou avec des amis proches. C'est très dur, ca fait couler des larmes mais cela soulage quelques peu.
Je sais également qu'il est un peu tôt pour vous parler de tout cela, la disparition de Bruno étant toujours trop proche! Mais je vous invite à repenser à ces quelques lignes dans quelques mois, quand l'effroyable douleur du déchirement se sera un peu atténuée.
L'unique consolation dans tout cela est pour moi l'intime conviction que je retrouverai mon frère dans un futur, plus ou moins proche. C'est ma note d'espoir. Je n'ai plus peur de partir, puisque je sais très bien que ce jour là, je le retrouverai.
De même, je suis certain que vous retrouverez Bruno, mais pas de suite. Pour lui, comme pour les autres, nous nous devons de continuer notre route.
Car, après tout, c'est à travers nous qu'ils continuent à vivre !